Si l’engouement autour des « Customer Data Platform » relève probablement de l’effet de mode, cette dynamique sur le marché de la relation client pointe du doigt un besoin qui n’a jamais été aussi important : la nécessité pour les entreprises de s’appuyer sur une vision client 360° et alimenter les outils métiers (CRM, marketing automation, support…) en données fiables et unifiées.
Nous allons le voir, les CDP sur l’étagère ne constituent qu’une réponse limitée à ce besoin. Les autres approches que sont les CDP sur-mesure ou les CDP modernes, « datawarehouse centric », apportent des solutions plus adaptées à votre réalité métier.
📕 Sommaire
Qu’est-ce qu’une Customer Data Platform ? [Définition]
Customer Data Platform : Définition
La multiplication des acronymes dans notre métier peut parfois prêter à confusion, commençons par poser les bases. Le CDP Institute, centre de ressource de référence sur le sujet, définit les Customer Data Platform, comme « un logiciel packagé qui crée une base de données client unifiée et continue, accessible par d’autres systèmes et applications ».
« packagé », « base de données client unifiée et continue », « accessible par d’autres systèmes et applications »… Décryptons ce qui se cache derrière ces notions encore une fois très jargonneuses :
Un logiciel packagé
Les CDP sont des logiciels, des Saas, prêts à l’emploi et à être intégré à votre dispositif data marketing actuel. Les briques fonctionnelles sont préconstruites pour faciliter un déploiement rapide et surtout pour une prise en main rapide par les équipes métiers.
On aborde ici une dimension clé de la proposition de valeur des CDPs : permettre aux équipes métiers – marketing bien sûr, mais pas seulement, on pense également aux équipes sales et de support client – d’intégrer de l’intelligence dans leurs actions quotidiennes indépendamment de l’IT.
Source : CDP Institute
Une base de données clients unifiée et à jour
Les CDP répondent à la problématique de la réconciliation des données clients. La course effrénée vers la relation client ultime a mené les organisations à construire des parcours d’achat plus complexes, qui reposent sur des canaux et outils toujours plus nombreux.
Chacun de ces outils génère des données sur chacun de vos clients… pour comprendre le comportement de vos clients et suivre les nombreuses interactions avec votre marque, un « référentiel unique » est indispensable. En clair, il s’agit d’une vue d’ensemble, qui relie toutes les informations relatives à un client donné. Cette vision à 360° de vos clients permet de contrôler la pression marketing et bien sûr d’affiner un peu plus vos messages.
Vos données clients sont donc centralisées, normalisées, enrichies et ce, continuellement. En synchronisant les données évoquées en temps réel (ou presque), une CDP vous permet d’accéder à une vision exhaustive, et à jour de vos clients.
Une plateforme accessible par d’autres systèmes et applications
Une Customer Data Platform ne se contente pas d’ingérer des données. Elle les restructure, ajoute des champs calculés telles que des tendances ou des modèles de scoring, puis les rend exploitables par vos autres outils et systèmes à travers des segments ou des agrégats.
Source : CustomerLabs.
Le schéma ci-dessus illustre bien la place centrale d’une CDP au sein de la stack data des organisations. Elle « unifie » les données issues des différentes sources (à gauche) et les rend exploitables par d’autres applications, les destinations (à droite donc).
Enfin, la grande force des CDP, qui les distinguent des autres outils de data management que sont les CRM, les ERP ou encore les DMP, réside dans sa capacité à traiter tous les types de données clients : aussi bien les données « chaudes » que « froides », online et offline.
Source : Kameleoon
Ainsi, une Customer Data Platform est en mesure d’ingérer des données comportementales, liées à la navigation par exemple, et de les associer à des données froides : les informations sur vos clients dont vous disposez dans votre CRM.
Customer Data Platforms : Un effet de mode qui cache un vrai mouvement de fond
La problématique de la réconciliation des données clients ne date pas d’hier. Les plus expérimentés d’entre nous se souviennent que la promesse d’organiser et unifier les données clients était également celle d’autres familles d’outils, les CRM Marketing notamment.
La nette augmentation du volume de recherche pour la requête « Customer Data Platform » depuis 2017.
À en juger par l’évolution de l’intérêt pour la requête « Customer Data Platform » depuis 2014, cette nouvelle famille d’outils est indéniablement à la mode, et les marketers ne s’y trompent pas ! Les éditeurs logiciels sont de plus en plus nombreux à s’emparer de ce terme vendeur pour des solutions qui ne correspondent pas toujours aux critères précédemment énoncés.
Pour autant, derrière cet effet de mode se cachent un réel mouvement de fond ou tout du moins une accélération très nette de besoins déjà existants :
- La course à la « relation client ultime ». Les parcours clients sont de plus en plus complexes, toutes les marques souhaitent proposer une relation client omnicanale (application mobile, chat automatisé, marketing automation, retargeting publicitaire, service client, etc.).
- La création de silo de données. Chacun des canaux cités génère des volumes de données toujours plus importants, malheureusement impossible à exploiter lorsqu’elles sont dispersées et « bloquées » au sein de ces différents applicatifs.
- La lutte constante entre la créativité des marketers et les possibilités des DSI / équipes data. Les équipes marketing aspirent à plus d’autonomie et sont lasses d’être dépendants de l’équipe data pour ajouter de l’intelligence dans leurs campagnes.
La capacité des Customer Data Platform à apporter une réponse concrète à l’ensemble de ces enjeux explique l’engouement croissant pour ces outils. Comme nous l’évoquions, l’intérêt pour cette nouvelle famille de solution a poussé de nombreux éditeurs à se catégoriser comme tel. Résultat, des outils de natures parfois très différentes en termes de technologies se définissent comme des CDP, nous les décryptons dans la section suivante.
Quelles approches pour constituer sa CDP ?
Lorsqu’il s’agit de construire votre Customer Data Platform, plusieurs choix s’offrent à vous :
- Se tourner vers une CDP « sur l’étagère » ou prête à l’emploi
- Construire vous-même une CDP ou base de données client sur-mesure
- Opter pour une approche hybride dont votre datawarehouse cloud sera le socle opérationnel
Rassurez-vous, nous avons constitué ce guide pour vous apporter des éléments de réponse 🙂
#1 Les CDP sur l’étagère
Cette première approche rassemble deux catégories d’acteurs : d’un côté les nouvelles offres CDP développées par les mastodontes du CRM, comme Salesforce ou Adobe de l’autre, les « pure players » du marché, on pense notamment à Segment.
Comment les géants de l’industrie Martech auraient-ils pu passer à côté d’une telle opportunité ? Impossible ! Fin 2018, Adobe, Salesforce, Oracle et SAP ont tous annoncé qu’ils mettaient au point une offre CDP.
Unification des données clients, vision client 360°, tracking des données chaudes et activation via vos outils métiers, on retrouve dans l’offre d’Adobe CDP tous les incontournables de la valeur ajoutée des Customer Data Platform.
Une solution tout à fait crédible bien sûr, mais qui présente deux limites structurelles :
- Le coût astronomique de ces solutions, inaccessibles pour des PME / ETI
- Ces outils n’ont pas été pensés comme des plateformes ouvertes mais comme des briques logicielles fermées et intégrées à l’écosystème CRM de chacun de ces éditeurs, un frein important en termes de contrôle de données.
Principalement depuis 2015, de nombreux autres acteurs se sont également positionnés sur ce marché porteur. Souvent à l’origine des Data Management Platform ou des outils Tag Management, le nombre de ces solutions a littéralement explosé au cours des dernières années. Dans son rapport de juillet 2021, le CDP Institute en recensait pas moins de 151.
Difficile d’apporter une définition commune à l’ensemble de ces outils dont le périmètre fonctionnel est très largement influencé par leur héritage : anciens outils de Tag Management, web tracking, Anaytics ou encore DMP.
Il existe en revanche une problématique commune à l’ensemble de ces outils et inhérente à leur proposition de valeur : ces solutions prêtes à l’emploi mettent à votre disposition des modèles de données et de scoring préconçus.
Malheureusement, si vous souhaitez sortir de ces modèles vous devrez attendre que votre éditeur face évoluer son produit. Une limite importante donc en termes de flexibilité, une question à vous poser si votre business model sort des schémas classiques.
#2 Construire vous-même votre CDP
Conscients de limites structurelles des CDP sur l’étagère que nous venons d’évoquer, de nombreuses DSI font le choix de construire une CDP sur-mesure, adaptée à leurs besoins, c’est une vraie tendance de l’industrie.
Cette approche présente les avantages suivants :
- S’adapter à vos cas d’usages. Les CDP sur l’étagère limitent le nombre de cas d’usage tout simplement car il en existe autant que de réalité métier : les possibilités sont quasi illimitées. Cette option permet de vous focaliser uniquement sur les cas d’usages qui vous importent, et d’en développer des nouveaux à mesure que vous vous développez.
- Le contrôle des données. Les éditeurs de CDP prêtes à l’emploi stockent vos données clients sur des serveurs dont ils sont propriétaire et ne vous facilitent pas toujours la vie pour y avoir accès. Construire votre propre CDP, c’est reprendre le contrôle sur vos données en les hébergeant sur vos serveurs.
Bien sûr, il ne s’agit pas d’une solution miracle. Construire vous-même votre Customer Data Platform requiert des moyens, des compétences et du temps dont bénéficient peu d’organisations. Il faut compter au minimum 2 à 4 mois pour construire une CDP in-house, et ce en faisant travailler une armée d’ingénieur data.
In fine, la construction d’une CDP propre est une solution envisagée uniquement par les grandes entreprises matures en termes d’exploitation des données client.
#3 L’approche hybride : Faire de votre Data Warehouse cloud votre socle opérationnel
Les Customer Data Platform sur l’étagère affirment très souvent pouvoir devenir la source unique de vérité de votre dispositif data. En réalité, pour beaucoup d’entreprises, cette source unique de vérité existe déjà, il s’agit de votre datawarehouse cloud ou moderne.
Jusqu’à 2012, années du lancement de Reshift par Amazon, un datawarhouse servait une uniquement de base pour l’Analytics et n’était pensé que pour supporter des requêtes ponctuelles, qui avaient lieu une fois par jour dans le meilleur des cas.
Les datawarehouses modernes (Snowflake, Google BigQuery, Firebolt) ont brisé ce plafond de verre en augmentant de façon exponentielle la puissance de calcul, tout en diminuant drastiquement les coûts de stockage.
Nos amis de Castor ont d’ailleurs rédigé un excellent article sur le sujet que nous vous invitons à lire si le sujet vous intéresse.
Cette rupture technologique majeure a entraîné le développement de tout un écosystème dont le datawarehouse est le pivot, on parle de plus en plus de stack data moderne.
C’est très joli tout ça, mais quid de ma CDP ? Vous allez comprendre 🙂
Faire de votre datawarehouse le référentiel client opérationnel de votre dispositif data vous permet de répondre aux cas d’usages traditionnels d’une Customer Data Platform :
- Vision client unifiée qui vous permet d’accéder à toutes ses interactions avec votre marque, en temps réel et sur tous les canaux.
- Intégration de vos segmentations et modèles de scoring avancés au sein de vos outils métier.
Sans connecteurs, comment mes données vont-elles remonter de mon datawarehouse vers mes outils opérationnels ? Effectivement, un datawarehouse seul ne suffit pas, à moins encore une fois d’avoir la force de frappe en termes d’ingénieurs data pour construire et maintenir des connecteurs sur-mesure nécessaires.
La solution est une nouvelle catégorie d’outil adaptée à ce besoin précis, on parle de CDP 2.0 ou moderne qui tourne sur une base indépendante qui peut être un datawarehouse.
Ces solutions répondent aux critères qui permettent de les catégoriser comme des CDP, en éliminant les douleurs évoquées pour les deux premières solutions :
- Un seul répertoire pour l’ensemble de vos données, pas uniquement pour vos données clients et dans bon nombre de cas celui-ci existe déjà : de quoi diminuer drastiquement les coûts et le temps de déploiement.
- Réduction des efforts d’intégration et de traitement des données. Vos données sont importées à un seul endroit et transformées une seule fois puis sont utilisées dans le reste de votre stack par la suite.
- Contrôle des données : Vous êtes maître des données stockées dans votre datawarehouse et pouvez choisir d’utiliser ces données dans les outils opérationnels qui vous semblent pertinents, sans délais.
Beaucoup plus légères en termes de déploiement et d’investissement, ces CDP donnent aux PME les armes pour lutter contre les grands groupes ou start-up qui s’appuient sur de grosses levées de fonds en leur permettant de devenir réellement data driven, pour conclure par un énième anglicisme jargonneux 🙂