Les entreprises qui veulent s’équiper d’un logiciel CRM ont tendance à faire l’erreur de se concentrer, dans les appels d’offres, sur l’étude et la comparaison des fonctionnalités. C’est négliger un élément déterminant : le modèle de données.
Le modèle de données conditionne en grande partie ce que vous allez pouvoir faire avec votre CRM.
En deux mots, le modèle de données décrit la manière dont vos informations clients sont organisées dans la base de données du CRM. La majorité des CRM proposent (imposent) un modèle de données fermé, ce qui signifie que vous n’allez pas pouvoir ajouter de nouvelles tables, créer tous les types d’attributs que vous voulez, construire toutes les relations entre objets que vous imaginez. Cela peut être très contraignant et compromettre la mise en oeuvre de certains de vos cas d’usage.
Modèle de données CRM | Description de l'approche |
---|---|
Multi-tables “fermé” | L'approche la plus courante. Le modèle de données du CRM est composé d'un ensemble prédéfini de tables (clients ; commandes : etc.), avec des capacités de personnalisation très limitées. |
Multi-tables “ouvert” | Dans ce type de modèle de données, vous avez la possibilité de créer de nouvelles tables. Mais le modèle est en général semi-ouvert, au sens où il est rarement possible de croiser les tables comme on veut ou d'utiliser des champs calculés dans les nouvelles tables. |
Event-centric | Toutes les informations sont représentées par un évènement consistant en une interaction et les attributs associés tels que la date, le produit ou le canal de communication. Ce modèle offre beaucoup plus de souplesse. |
Nous allons revenir dans cet article sur la définition d’un modèle de données CRM et vous présenter les 3 principales approches utilisées par les éditeurs CRM. Nous terminerons par quelques conseils pour vous aider à choisir le modèle de données le plus approprié à votre besoin.
📕 Comprendre le modèle de données d’un CRM :
Qu’est-ce qu’un modèle de données en CRM ?
Tout d’abord, il est nécessaire de rappeler qu’un CRM est avant tout une base de données permettant de gérer des interactions avec des clients, d’envoyer des emails et, notamment en B2B, de collecter, organiser et analyser des données sur les clients. Cependant, l’organisation de la base de données du CRM est sensiblement différente selon le type d’activité : B2C ou B2B. Malgré cela, le socle d’un CRM reste une base de données constituée de tables, de façon similaire à un fichier Excel avec des onglets.
Néanmoins, et contrairement à un fichier Excel, l’utilisateur n’a pas toujours la possibilité de créer ses propres onglets et bénéficie de moins de flexibilité quant à l’organisation des données. Cette organisation prédéfinie des données et la manière dont les données sont organisées dans un CRM correspond à ce que l’on appelle un “modèle de données”. L’éditeur du CRM fixe ce modèle de données, même s’il laisse parfois une certaine souplesse et quelques marges de manœuvre.
Le modèle de données du CRM est la structure fondamentale sur laquelle les données sont stockées et organisées. Plus ou moins souple et plus ou moins rigide, il permet aux entreprises de mieux comprendre leurs clients et leurs besoins, et leur fournit les informations nécessaires pour améliorer leurs produits et services, ou pour créer des profils détaillés de leurs clients. Ces profils peuvent être utilisés pour cibler les clients et leur offrir des produits et services plus adaptés à leurs besoins.
Ce modèle de données est composé de plusieurs éléments différents, tels que les personnes, les objets, les événements et les relations entre ces éléments. Ces éléments sont liés entre eux par des liens qui peuvent être définis par l’utilisateur dans le cas d’un système souple. Ces liens peuvent ensuite être analysés pour fournir des informations précieuses sur les clients et leurs achats. Concrètement, le modèle de données est constitué de différentes tables qui sont liées d’une certaine manière, selon certains schémas. On y trouve souvent, par exemple :
L’organisation des données est un sujet critique dans un CRM, bien que fréquemment négligé. En effet, la capacité à organiser les données détermine la flexibilité dont l’utilisateur disposera pour segmenter et trier les informations.
Les 3 principales approches de modèle de données CRM
Il existe 3 principaux types d’approches pour structurer le modèle de données au sein d’un CRM.
L’approche multi-tables “fermée”
L’approche multi-tables « fermée » est la plus courante, et on peut la retrouver sur la plupart des éditeurs CRM. C’est un modèle multi-tables, ce qui signifie que le modèle ne repose pas sur une table unique avec les contacts, mais intègre aussi un certain nombre de tables supplémentaires, contenant par exemple les achats, les tickets de caisse, les boutiques… Dans ce modèle, les tables sont prédéfinies par l’éditeur CRM. On ne peut pas créer de nouvelles tables, et en cela, c’est un modèle “fermé”.
Ainsi, dans un modèle CRM classique pour du B2B, les tables seront constituées de leads, d’entreprises, de clients, de factures et d’interactions. Dans un modèle B2C, les tables seront constituées de contacts, de commandes, de tickets de caisse, de boutiques et d’interactions. Cependant, l’utilisateur n’a pas la possibilité de créer de nouvelles tables et doit donc se contenter des tables pré-existantes. Il n’est par exemple pas possible de créer une nouvelle table “Abonnements” afin gérer des données d’abonnement. Il faut nécessairement considérer les abonnements comme des commandes, et ceux-ci apparaîtront alors dans la table « Orders ».
De la même manière, les « avis clients » entreront dans la table des interactions, au même titre que les autres événements sur le site web (pages vues, etc.). L’utilisateur est ainsi obligé de s’adapter au modèle de données rigide du CRM.
L’approche multi-tables “ouverte”
Ce modèle permet de créer de nouvelles tables d’une manière similaire à la création de nouveaux onglets dans un tableau Excel. Il est théoriquement possible d’ajouter n’importe quel type de table pour ensuite les organiser d’une façon personnalisable. Actito est un exemple d’éditeur proposant ce modèle ouvert, permettant à l’utilisateur de créer de nouvelles tables dans son modèle de données, depuis le Datamart Studio.
Dans les faits cependant, il n’est pas toujours possible de créer toutes les tables que l’on souhaite. Il est même parfois impossible de les relier entre elles de la façon désirée ou d’ajouter des champs calculés dans les nouvelles tables. Les modèles “ouverts” ne sont donc pas toujours aussi complets qu’il pourrait sembler. Or, lors de la sélection d’un CRM, l’un des principaux éléments à analyser au moment de l’appel d’offres est justement le degré d’ouverture du modèle.
L’approche event-centric
Cette approche a été popularisée il y a une dizaine d’années, notamment par des éditeurs comme Segment ou Klaviyo, Sendinblue… L’idée fondamentale derrière ce type de modèle de données est qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une multitude de tables pour représenter tout un business model.
Toute interaction peut être représentée par un événement. Dans la base de données, chaque interaction est associée à une date et contient certaines propriétés. L’intérêt majeur de cette approche est que les propriétés des événements n’ont pas besoin d’être définies à l’avance. Par exemple, il est possible de créer un event nommé “vue produit” et faire en sorte que les attributs de l’événement soit le nom du produit, son prix, sa catégorie, sa couleur.
Le modèle event-centric associe donc des contacts à des événements. Le modèle de données correspond alors à une table de contacts avec l’ensemble des événements associés à chaque contact. Ces événements peuvent avoir une structure différente selon l’event. De plus, il est possible de s’appuyer sur les propriétés de l’événement avec plus ou moins de fonctionnalités selon l’éditeur logiciel.
Ce que rend possible l’approche event-centric
La plupart des logiciels permettent par exemple de réagir aux événements en mettant en place des scénarios prédéfinis. Ainsi, l’entrée d’un event type A dans la base de données entraine le déclenchement d’une action. Cette action peut elle-même être modifiée selon les propriétés X ou Y de l’event A. Par exemple, une demande de devis par un client entraîne automatiquement une première prise de contact, par SMS ou par email selon le choix du client. Certains CRM plus avancés permettent d’utiliser les propriétés des événements comme variables de personnalisation dans un template avec un important niveau de granularité.
De plus, ces events peuvent servir de fondement pour la segmentation client. Là encore, l’efficacité du CRM pour cette fonctionnalité varie grandement selon l’éditeur. Des éditeurs très matures tels que Braze sont vraiment excellents et vont permettre de réaliser des segmentations sur n’importe quelle propriété de tous les événements. Il est par exemple possible de développer un segment en sélectionnant tous les clients ayant consulté un produit d’une catégorie A avec la couleur XYZ. Il est même possible d’actualiser ces segments selon une temporalité pré-définie.
Notez aussi que les acteurs qui ont une approche event-centric comme Klaviyo ont aussi souvent une autre approche supplémentaire. Cela permet principalement de récupérer le catalogue produit qui est extrait depuis un PIM ou depuis un CMS.
Conseils pour choisir le modèle de données CRM le plus pertinent
Les 3 types de modèles définis ci-dessus offrent chacun un certain nombre d’avantages et d’inconvénients. Comme pour toute autre brique du SI, le choix mal avisé d’un outil peut avoir des conséquences très néfastes et à long terme pour votre entreprise. Dès lors, il faut s’assurer que le CRM que vous choisissez repose sur un modèle de données pertinent pour votre activité.
Simplicité Vs Flexibilité
Essentiellement, le choix consiste en un dilemme entre simplicité du CRM et flexibilité du modèle de données. Plus le modèle de données est figé et prédéfini, plus il sera simple d’utiliser le CRM et de travailler avec la base de données. Cependant, cette simplicité au sein du logiciel peut trouver de nombreuses limites dans les cas d’usages de l’entreprise. Un modèle fermé peut être extrêmement éloigné des besoins d’une entreprise au business model complexe. L’entreprise a alors intérêt à se tourner vers un modèle plus souple. On peut ainsi résumer ce dilemme dans un graphique en deux dimensions :
Puisque le modèle en multi-table fermé est contraint par de nombreuses limites, la mise en place d’un modèle « event-centric » pourrait paraitre comme une bonne solution par défaut qui couvrirait les besoins supplémentaires qui pourraient apparaitre avec le temps. Cependant, adopter une telle solution peut nécessiter de mettre en place une CDP (Customer Data Plateform) en amont, et de revoir son dispositif data. Cela représente donc de nombreuses exigences et implique de nombreux efforts – inutiles si cela ne répond pas à un besoin réel de l’entreprise.
Comment procéder pour choisir son modèle ?
Pour savoir quelle approche est la plus pertinente dans votre métier, il faut alors partir de vos besoins. Vous pouvez suivre cette liste d’étapes pour définir le modèle vous correspondant le mieux :
Une fois ce travail de reflexion fait, vous pouvez comparer vos besoins aux fonctionnalités proposées par les éditeurs de CRM. Il ne s’agit pas seulement de prendre en compte les informations nécessaire au suivi de l’activité, mais aussi d’inclure les variables dont vous aurez besoin pour vos différentes campagnes CRM ou marketing. Après avoir défini clairement ces éléments, vous devez vous informer quant au travail de transformation nécessaire pour les intégrer dans le CRM.
Le niveau de complexité de ce travail varie grandement. Il est parfois indispensable de transformer certaines informations en objets JavaScript dans le cadre de modèle de données event-centric. En utilisant conjointement un CRM efficace et un pipeline de transformation des données, il est possible de réaliser un très grand nombre de tâches. Il est toutefois nécessaire d’avoir suffisament prévu ces use-cases en amont et d’avoir anticiper toutes les difficultés majeures.
En définitive, il faut donc précisement définir ses besoins pour choisir un CRM au modèle de données capable d’y répondre. Cela permet aussi d’éviter des manipulations et des transformations complexes des données et du SI qui seraient inutiles l’entreprise. Négliger la phase de réflexion peut s’avérer coûteux et très pénalisant pour votre activité.